I feel that there's something strange between us

Le vent souffle doucement sur mon visage. Mes cheveux flottent doucement. Le froid de l’hiver, déjà si proche, mord chaque centimètre de mon corps. Enfin, c’est ce que j’essaye de me persuader. Il y a longtemps, ce même froid me faisait rêver dans mon pays. La grande Russie; là où l’hiver rigoureux ne laisse survivre que les plus forts. Là-bas, je ressentais encore cette force qui émanait de la toundra. Aujourd’hui, je ne ressens plus rien. Mon corps est comme anesthésié de toutes sensations. Je ne perçois plus aucune chaleur, plus aucune caresse qui pourrait parcourir cette peau et réchauffer mon être.

Je suis arrivée à l’institut il y a seulement quelques jours et même s’il est rempli de gens comme moi, des monstres, je me sentait encore plus seul. C’est le professeur qui m’accueillis. Cet homme bienveillant s’est tout de suite occupé de moi. C’est bien le seul. Les autres, eux, préféraient connaitre ma malédiction plutôt que de savoir comment j’allait.
J’ai pourtant trouvé un sanctuaire. Un refuge où je m’enfuyais pour oublier le monde dans lequel je vivait. Ici, au milieu des arbres, je réfléchissais. Je m’aidais à survivre, à ne pas sombrer dans la folie. Ici, je n’étais pas dérangée. Je me trouvais trop loin de tout. Personne ne venait ici. Sauf le professeur qui montrait un certain intérêt pour moi ainsi qu’à tous ses élèves. Avec lui, je me sentais en sécurité. Il s’inquiétait pour moi. Surement parce que je ne venais plus aux cours. Puis après avoir longuement parlé, je m’étais moi-même attachée à ce personnage complexe renfermant plein de qualité. Moi, je ne pouvais toucher personne physiquement et lui au contraire arrivait à toucher n’importe qui mentalement. Cette différence nous rendait, au contraire s, complémentaires. Comprenant mon désarroi, il me fit les cours seuls. Puis me persuada de retourner en classe. Mais le coin de forêt restait quand même un monde à part connu seulement de nous deux. Ici, au-milieu des fougères, des mousses et des herbes, le temps semblait s’être arrêté. Le givre couvrait le sol et les plantes ce qui rendait le paysage plus lumineux.  

J’entends du bruit mais ce ne sont pas les habituels grincements des roues du professeur et en plus il est bien trop tôt pour qu’il vienne. Ce sont des pas. Quelqu’un vient. Pourtant, personne n’était encore venu jusqu’ici. J’ouvre les yeux et me relève brusquement. Des vertiges me prennent et je pose un genou à terre avant de me reprendre.

- Qui là ? dis-je dans un anglais encore un peu sommaire.

Personne ne répond. Je tends mes deux bras devant moi pour pouvoir me défendre. Un frisson me parcourt le dos. Cela fait bien longtemps que je n’avais eu cette sensation. En vérité, je n’avais plus eu peur depuis mon départ prématuré de Russie.