My light

Rewind
Quand on veut parler de quelqu'un, on commence souvent par parler de sa famille. Pour Lily, le tour de sa famille va être vite fait. Elle, sa mère, point final. Certes, il doit probablement bien y avoir un individu pour offrir le gamète mâle nécessaire à la conception de la petite Lily, mais de lui, nulle trace. Si pressée un peu plus sur la question, Calla – sa mère -  lui a toujours répondu qu'elle avait eu envie d'un enfant et qu'il ne lui avait pas été bien compliqué de trouver un géniteur. En garder la trace ne lui avait pas semblé nécessaire.
A la fois tout ce qu'il y a de plus simple mais bien un peu décalée, voilà ce qui pourrait résumer la vie de Lily par la suite.

Pour le moment, parlons un peu de Calla. Vague représentante d'une nouvelle génération qui se souhaiterait hors d'une société qu'elle abhorre et trouve éprouvante, sectaire et misogyne, elle a choisi de vivre au gré du vent et de voyager comme bon lui semble pour profiter de toutes les opportunités de la vie et goûter à des plaisir et à une liberté que les pauvres citadins sédentaires ne peuvent même pas imaginer. Selon ses mots à elle.
D'un point de vue purement pragmatique, Calla vit dans un camion aménagé et s'arrête quelques mois dans un état, quelques semaines dans un autre, vivant de petits travaux – généralement couture, jardinage ou entretien du domicile des sédentaires en question – et de son amour du grand air. Pourquoi amener un enfant dans cette vie là ? Comme elle l'a toujours dit à Lily, parce qu'elle en avait envie, parce qu'elle pouvait le faire, alors pourquoi ne pas le faire ?

Finissons l'aparté familiale : les grands-parents ? IAB, Inconnus Au Bataillon pour Lily. Selon Calla, leur mode de pensée et de vie est bien trop toxique pour qu'elle y expose Lily ou même tout simplement qu'elle y pense.  Rien de plus n'a été dit dessus. A savoir ce que cela signifie... Lily ne le sait toujours pas.

Donc voilà Lily la dedans. Passons les premières années, où, pendue au téton de sa mère, sa conscience du monde extérieur est restée assez limitée. Passons encore quelques années, à jouer dans les jambes de sa mère, dans du tissu ou dans la terre.

Fast forward 
6ans - Grade School aka Ses premières confrontation au genre humain

Ce n'est évidemment pas un détail aussi insignifiant que la nécessité d'une scolarité correcte pour sa fille – autant puisse-t-elle l'adorer - qui aurait motivée Calla à se fixer un peu plus. Des écoles, il y en a partout dans les USA, pourquoi donc s'en faire ? La seule concession qu'elle accepte de faire à partir du moment où sa fille sera en âge d'aller à l'école est de ne s’arrêter que dans des villes suffisamment grandes pour qu'il y ait une école.
Ainsi donc commença le bal des différentes écoles, où le même jeu recommençait inlassablement à chaque nouvel arrêt. D'abord la curiosité envers cette nouvelle fillette qui arrive en cours d'année, des mains tendus et des gentils sourires. Puis une curiosité un peu plus sordide « tu n'as pas de maison ? » « tu n'as pas de papa? », puis des regards de travers pour ses vêtements, cousus ou retouchés par sa mère mais jamais de marques connus. Quand aux jouets ou jeux dernière mode ? N'en parlons même pas, une fois sur deux, Lily ne sait même pas ce dont il s'agit.  Le coup de grâce, c'est quand l'opinion des parents – le plus souvent fort peu flatteur – arrive dans la bouche des enfants. De quoi forger le caractère de n'importe quelle petite fille. Son seul réconfort reste sa mère, qui lui dit qu'il ne faut jamais chercher à étouffer ses différences mais au contraire les arborer plus fièrement encore. Plus facile à dire qu'à faire quand on a 7 ans, encore des difficultés à lire parce qu'avec 6 écoles et 6 méthodes différentes, il y a forcément des points techniques qui lui échappent, et qu'on voudrait juste se faire des copines.

Fast forward 
11 ans - Junior High School aka l'intégration
Ce qui était agréable tout enfant, à savoir une liberté indéniable, l'est encore plus pendant la pré-adolescence.
Ce qui était désagréable, une vague impression d'ostracisme et de ne jamais être à sa place, devient complètement étouffant, et cette fois, Lily a les mots à mettre dessus. Non seulement elle maîtrise bien mieux la lecture et le vocabulaire, mais surtout, les autres enfants ne se privent pas pour le lui dire.
Et il faudra plus que savoir coudre, tricoter, ou faire une magnifique tarte à la rhubarbe en partant des ingrédients de base pour compenser.

Ce petit plus, Lily a commencé à s'en rendre compte quand elle se fait peur parce qu'elle a l'impression que les ombres dansent autour d'elle. Quand la visite médicale scolaire a prouvé qu'elle avait 10/10 à chaque œil alors qu'elle a l'impression que les choses deviennent flou ou qu'un point lumineux vrombit dans son champs optique.
Non, elle n'est pas folle – même si selon certaines rumeurs, sa mère l'est, et donc elle le sera forcément aussi – parce que d'autres voient ce qu'elle voit.
Il faudra quelques essais et expérimentations dessus, un peu de concentration et quelques cobayes plus ou moins volontaires – ce n'est pas ce qui manque dans la cours du collège, et de toute façon, dans quelques mois, elle ne les reverra plus jamais – mais elle finit par comprendre que ce ne sont pas des illusions d'optique simples. Ces petits tours, c'est elle qui les provoque. Cette compréhension semble ouvrir la porte. Soudain, le monde – du moins ce que l'on en voit ! - est à ses pieds.
Comment s'en servir maintenant ?
L'idée viendra vaguement d'un épisode de Supernatural, regardé en cachette avec d'autres filles de sa classe dans la salle vidéo du collège.
Quelques recherches plus tard, le mot Wicca vient s'imposer de lui-même. Assez vague mais avec une connotation effrayante, surtout les fois où elle s'arrête dans la Bible Belt, assez proche de ce que tout le monde s'imagine d'elle et de sa mère - des sauvages qui vivent pieds nus dans la nature – pour que l'idée ne soit pas invraisemblable.

En quelques mois, Lily passe de pré-ado paumée à mini-sorcière wiccan qui ne se balade jamais sans ses cristaux autour du cou, ses herbes dans son sac et ses rituels prêts à maudire ceux sur son trajet. Des rituels récupérés sur internet, mais visuellement plus vrais que natures : qui prétendrait ne pas y croire quand l'air devient trouble, que ses mains disparaissent puis se mettent à briller ? Lily apprend la mise en scène, et devient princesse en son royaume. Partout où elle va, elle arrive à remettre en place le même scénario : elle s'entoure d'une petite cours de 4 ou 5 personnes fascinées par ses « pouvoirs ». Si certains se méfient ou n'y croient pas... et bien, personne ne le dit trop fort par crainte des représailles. De toute façon, elle partira bien assez vite , mais pendant ce temps, elle aura pu profiter des petits cadeaux en échange de tels ou tels rituels, et de gens qui se pressent pour être à ses côtés plutôt que pour la fuir.

Fast forward
15 ans - High School aka la compréhension

Une grande révélation arrive avec le lycée : la physique.
Non, pas son physique, la modification de son corps avec la puberté, les seins et tout le reste – ça, ça n'a pas été le feu d'artifice tant vanté dans les livres de bio, tout juste un pétard mouillé – non, les cours de physique, et surtout, l'optique. D'un coup, la vague notion de ce qu'elle faisait devient quelque chose de clair et de quasiment concret. Et les possibilités qui s'ouvrent semblent infinies et merveilleuses. Ce n'est pas du flou ou du sombre, c'est courber ou détourner la lumière. Et la diffraction ! Des arc-en-ciel sur commande !
Soudain, Lily s'éclate.
Heureusement, parce qu'à côté, ce n'est pas toujours la joie. Si la wicca a toujours ses charmes et ses détracteurs, les lycéens sont parfois moins crédules et monter ses petits bateaux ne marchent pas toujours aussi bien. O, il y a toujours des effets – c'est fou comme plonger quelqu'un dans le noir peut choquer les âmes sensibles – mais les résultats sont loin d'être aussi gratifiants que prévus.
C'est aussi là qu'elle entend pour la première fois le mot mutante, crachée à son visage comme une insulte.
Comme avec la physique, c'est une nouvelle révélation, un mot précis qui explique ce qu'elle. Et avec lui, arrive de nouveaux désagréments. Comme de se retrouver à s'expliquer auprès de sa mère parce qu'un enfoiré n'aura pas trouvé plus courageux que de taguer leur camion d'un « SALE MUTANTE » rouge et haineux avant qu'elle ne rentre du lycée.
De Calla, le même conseil que quand elle était petite,  qu'il ne faut jamais chercher à étouffer ses différences mais au contraire les arborer plus fièrement encore. Et l'assurance qu'elle l'aime et l'aimera toujours, même si des cornes bleues venaient à lui pousser pendant la nuit.

Fast Forward
20 ans – College ? aka Mutant and Proud

Malgré quelques difficultés, Lily va réussir à terminer le lycée – avec un an ou deux de retard, merci aux quelques écoles qui se fichent de perdre les notes et les bulletins des élèves présents pour moins d'un semestre -  mais va se présenter à elle un problème dont elle n'avait jamais vraiment parlé avec sa mère.
Son avenir. Non, désolée maman, errer au gré du vent n'est pas pour elle. La seule chose qu'elle a envie de faire, tout de suite ? Etudier la physique avancée, et avec lui son don. Certes, elle n'a pas besoin du premier pour expérimenter avec le second, ce dont elle ne se prive pas, mais elle y a pris goût, et franchement, s'y éclate. Pourquoi ne pas aller plus loin alors ?
Un seul mot : argent.
Faire des études, ça coûte cher. Sans même parler d'une université cotée et dont les barèmes lui sortent complètement de l'esprit, se loger, payer les bouquins, tout à un coût, et ce n'est pas sa mère qui pourra l'aider. Les bourses, avec un dossier scolaire comme le sien ? Compliqué. Les prêts étudiants ? Tout juste si elle peut entrer dans une banque sans que la sécurité ne lui colle au cul.

Reste une possibilité, une qui lui avait été murmurée à l'oreille quand le mot mutant avait été accolé à son nom. Plusieurs fois, elle avait croisé d'autres mutants, plus ou moins discrets, plus ou moins "intégrés" qui lui avaient signifié l'existence d'une école pour les gens "comme elle", qui pouvait l'aider. A quoi bon ? Elle ne s'était jamais sentie prisonnière de son don au point d'avoir besoin d'aide. Mais elle avait quand même gardé le nom d’institut Xavier griffonné au fond d'un calepin au cas où.

Mais maintenant...
Et pourquoi pas après tout ?