Throw me to wolves, I'll came back leading the pack.

• Les premières années de vie sont loin d'être les plus passionnantes et riches en péripéties. Comme tout les bébés, Romeo découvre le monde qui l'entoure, sa maman, son papa, sa maison. Innocent de la marginalisation des mutants, qui éclatera comme une bulle de savon des années plus tard. Et dont il sera, comme tant d'autres, lui aussi victime. Mais ne nous écartons pas de l'enfance de l'unique enfant des Palaeksa. Le couple habite une simple et confortable demeure en Floride, dans un de ces petits villages reclus dans une campagne assez sauvage et au climat quasi-tropical.
Maman Palaeksa souffre depuis plusieurs années d'un cancer. C'est un fait acquis, assimilé. Tout comme l'épée de Damoclès qui s'approche de plus en plus de son cerveau, rongé par de vilaines tumeurs à la lente progression.
Papa, lui, travaille comme homme à tout faire pour le petit village. Tout le monde le connaît et l'apprécie pour ses habilités manuelles, et préfère ignorer son penchant dévastateur pour la bouteille. Savoir qu'il perdra sa femme un jour ou l'autre, ça vous détruit un homme, pas vrai ? Et pourtant il l'aime. Qu'est ce qu'il ne donnerait pas pour la savoir en rémission. Mais les choses sont telles, et il faut les accepter. C'est du moins ce qu'elle lui répète, l'air farouche, et Romeo paisiblement endormi dans ses bras.
Peut-être que c'est ainsi qu'il gagnera le refus inconscient de s'attacher, ou peut-être pas.


• Le jeune garçon grandit, s'affirme beaucoup, voire un peu trop, et les choses ne s'arrangent en rien quand Maman fini par succomber face à l'ignoble et lâche maladie. Papa, lui, s'enfonce davantage dans l'alcool, mais il continue de gérer la maison, et le môme.
L'adolescence arrive à grand pas, et après plusieurs mois de doute teinté d'un lourd silence accompagné de regards anormaux, papa se rend à l'évidence. Son fils n'est pas comme les autres. D'accord, il est plutôt coriace dans le genre rebelle. Mais il se met à changer d'une façon... Totalement déstabilisante. Les élans de colère qui le saisissent sont dérangeants. D'une façon telle, qu'il prendrait presque peur de son propre enfant. Il passe des nuits entières hors de la maison, et ses résultats scolaires -quant il daigne suivre les enseignements- n'ont jamais étés aussi mauvais. Seulement, le dialogue est rompu. Avec l'âge, le lien père -fils s'illustre davantage en rapport de force d'homme à homme.
Finalement, c'est Romeo lui même, le jour de la majorité, qui descends les escaliers d'un pas lourd, qui sonne différemment.

- Papa. Il faut que je te montre quelque chose.

Alors papa suit. Romeo montre. L'impensable. Un choc. Lui, son fils ? Capable d'une telle... Aberration ? Effrayé, il l'est. Autant que dégouté. Il en a vu des choses dans sa vie pourtant. Et il n'est pas du genre à renier son garçon. Seulement, les gens comme ça, il n'en veut pas chez lui. Un point s'est tout.

C'est deux ans plus tard que Roméo quitte sa Floride natale pour New York. Changement radical. Mais il se sent prêt.


• Il met du temps à s'acclimater. Mais bon, il est pas à plaindre non plus. Il vit sur ses économies, et passe son temps à chercher un travail qui puisse convenir à sa... Condition. Il se contrôle un peu mieux. Il s’entraîne en fait. S'il a bien conscience d'une chose, c'est qu'il peut se mettre à devenir un véritable danger pour les personnes alentours. Non pas que ça le choquerait plus que ça. Mais l'idée d'être découvert et finir sa vie en prison l'enchante pas tellement.

Du coup, il sort de son petit appart uniquement pour assumer son poste : Gardien de nuit dans diverses entreprises, ou pour s'approvisionner en alcool. Faire des frais en nourriture ne lui est pas forcément utile. Il s'octroie de belles balades parfois, en foret, bien que ce soit loin, et la bête qui use de lui s'en donne à cœur joie.

Quelques années passent encore. Et puis, quand il approche la trentaine, il arrive le genre d’événement détestable qui débarque sans surgir.
Une nuit, alors qu'il fait nonchalamment le tour d'un énorme magasin de meubles, des bruits étrangement suspects lui parviennent. L'intérieur. C'est là que quelque chose se trame. Des altercations, il en a eu. Et faut dire qu'en général il s'en sort bien, même s'il fait pas dans la dentelle. Il se plaît même a supposer que sa partie prédateur lui confère une aura carrément intimidante, mais c'est un autre sujet.

Sans trop de pression, mais l'adrénaline commençant à monter, il entre donc discrètement dans l'enceinte du magasin. Sa mutation lui confère une vision nocturne favorable. C'est donc assez vite qu'il repère l'intrus, bien que Romeo sache déjà qu'il n'est pas seul. L'homme ne porte pas de cagoule. Fait hautement imprudent, d'autant plus que son identité est connue du gardien. C'est l'un des trois connards du lycée. Un ange passe, et les pulsations cardiaques du trentenaire s’accélèrent. Dangereusement. Le genre de rythme qui ne présage rien de bon, et que rarement, mais dans un cas tel, il ne peut contrôler. Son sang s'agite. Il le sent. Bouillonner en lui. Faire écho à une rage animale et sauvage, qui s'avère meutrière. Alors, il s'avance. Un peu plus prêt. L'intrus le remarque sans doute, mais semble ne manifester pour l'heure aucune peur. Grave erreur. Pire encore, il ose pointer vers lui un genre de poignard à l'éclat blanc ridicule.

Romeo perd la maîtrise. A-t-il seulement cherché à la conserver ? Autre débat. Toujours est-il que la seconde suivante, c'est un tigre, haut d'un bon mètre cinquante, qui ondule avec une savante lenteur vers le cambrioleur.

Là, il prends peur. Un cri. Et une énième erreur, la dernière : Il se met à courir. Galvanisé par le puissant instinct de chasseur qui l'habite, la bête esquisse plusieurs foulées, avant de mettre le fugitif à terre, et d'abréger ses cris pitoyables. La satisfaction. L'excitation. Les deux autres arrivent, attirés par les appels de leur collège. Eux aussi, reconnaissent très bien le félin. L'un deux hurle des injures désespérées. Certainement parce qu'il avait d'ores et déjà compris. Jamais ils ne sortiraient du magasin vivants.
C'est justement lui qui respirera le dernier.

De la nuit meurtrière, seul Romeo sortira vivant. Avec d'étonnants remords. S'en suit une période sombre de quelques années, ou il passe le plus clair de son temps à boire, dormir, ou décuver c'est selon, et renier son identité. Jamais il n'aura été seulement soupçonné des trois meurtres, et c'est à la fois heureux, et dommage. Peut-être l'enfermement aurait-il été bénéfique ?

• Dans sa 35ème année, il prends connaissance de l'existence d'une école de surdoués. La nouvelle résonne en lui avec force, bien qu'il ne comprenne encore pas pourquoi. C'est après y avoir été qu'il tente sa chance en tant que Gardien de Nuit. Le poste en lui-même lui convient tout à fait. Et la vraie nature de l'Institut, qu'il découvre peu après, lui confirme son ressenti. C'est là qu'il doit être. Après tout, quelle meilleure place qu'une énorme maison de mutants pour l'un de ses représentants ?