La vie de Jake Allen était parfaitement normale jusqu'à son huitième anniversaire. Mary Allen était une femme comblée. Son mari était un ange, toujours là pour leur seul et unique fils. Jake était un futur prodige, du moins, c'était comme ça qu'elle le voyait. Son fiston était parfait. Son fiston, tout lui réussissait. Les Allen formaient une famille parfaite du point de vue de tous. Jake Allen était un artiste, il aimait peindre. Il aimait aussi les chiffres. Il aimait aussi parcourir le monde à travers des documentaires. Son grand rêve était d'aller sur la lune. Mais aussi d'être reconnu pour avoir découvert le vaccin du siècle. Et peut-être aussi de devenir un PDG d'une super grosse boite. Bref, que des rêves d'enfant qui ne connaissaient pas encore la vie d'adulte. Et pourtant, ce matin-là, le matin de ses huit ans, sa vie bascula complètement. Sa vie, mais aussi celle de ses parents.
Jake Allen dévala les escaliers à toute allure ce matin-là. Ses parents l'attendaient dans la cuisine. Sa mère avait disposé quatre petits paquets colorés sur la table du salon, elle avait fait une fournée de cup cake et un cheesecake l'attendait. Elle le serra dans ses bras, son père l'embrassa. Aujourd'hui Jake avait huit ans. Et aujourd'hui, à la fin de la journée, ils allaient tous partir pour la Californie, voir le grand parc d'attractions que Jake rêvait de voir depuis toujours. Disneyland, le vrai de vrai. Et là, l'horreur se produisit. Il souffla ses bougies. Trop de joie. Trop de plaisir. Trop d'excitation. Et paf.
Le premier clone était né de la joie du petit Jake Allen. Ce fut aussi ce clone qui eut une de vie la plus courte de toute l'histoire des clones. Il avait soufflé ses bougies et, devant le regard stupéfait de ses parents, il était arrivé. Il s'était comme décollé du véritable Jake pour atterrir dans le gâteau plein de crème. Il s'était redressé et avait adressé un large sourire à son Jake créateur. « Salut !» Et sa mère avait hurlé. Enfin, sa mère, pas la sienne, celle de son créateur. Le père de Jake aussi avait pété les plombs. Quand à Jake, il n'avait rien dit. Il était resté cloué sur place à le regarder avec des yeux ronds. Il avait approché la main de son visage. Il avait avancé d'un pas. Il obéissait à la volonté de son créateur et ce dernier voulait le voir de plus près, il le sentait. Il le toucha. Et ce fût la fin de la vie du clone numéro un. Le Jake originel le réabsorba comme une éponge et hurla enfin à son tour.
Le petit Jake monta dans sa chambre et s'y enferma pour pleurer deux minutes. Ce n'était pas son genre de pleurer mais aujourd'hui c'était autre chose. Il avait découvert qu'il était un monstre, quelque chose de pas normal. Et ces parents étaient pétrifiés dans le salon. Ces parents eux aussi avaient peur. « Qu'as t-on fais de notre fils chéri ? » disait la mère. « Demain, demain nous l’emmènerons voir un docteur ». Bien évidement, le lendemain matin, le docteur ne trouva rien à redire. Pour lui le petit garçon était en bonne santé. Alors Monsieur et Madame Allen allèrent chez un autre médecin, puis un autre médecin, jusqu'à faire ceux de toute la ville. Nul trace du clone. Et Jake avait peur, peur de ce qui pouvait surgir de son corps à n'importe quel moment.
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Clone numéro 02. Les parents de Jake avaient décidé de laisser tomber les médecins. Un nouveau Jake fit son apparition, lors d'une séance film à la maison, en famille.[/b] Les parents de Jake avaient décidé de laisser tomber les médecins. Cette fois-ci, la famille resta calme. Pourtant, quand le clone ouvrit la bouche, parlant à nouveau comme leur fils, Madame Allen prit peur et s'engagea aussitôt une course poursuite dans la maison. Le clone numéro 02 fut alors capturé. Il ne bougeait plus, roulé en boule, tandis que Madame Allen le menaçait d'un couteau. Monsieur Allen lui avait lancé un de ses filets de pêche dessus et quant au fils, il était terrorisé sur le canapé. « Aide moi Jake, aide moi ! » Le clone connaissait son nom. Évidemment, puisqu'il est lui. Enfin, comme lui, de lui. Ce fut à ce moment-là que le facteur sonna, ouvrit la porte pour déposer un colis et vit un homme et une femme, menaçant un gamin dans un filet de pêche. Le jour suivant, la famille Allen déménageait dans le nord de l'état.
Clone numéro 03. Le Jake en fureur. Il avait débarqué comme ça, après que Jake soit rentré en colère de l'école. Mauvaise note ou énième bizutage, le garçon était au plus quand son clone se pointa. Pourtant cette fois-ci, il ne prit pas peur, il ne prévint passes parents, encore au travail à cette heure. Au contraire, il parla longuement avec le Jake numéro 03. Il laissa éclater toute sa colère, toute sa fureur et ce jour, Jake avait huit ans et 3 mois. À cet âge-là, et trois mois après sa mutation, il comprit enfin que ces clones ne lui voulaient pas de mal, qu'ils faisaient partie intégrante de lui et qu'il lui obéirait au doigt et à l’œil.
Clone numéro 04. L’expérience. Ce clone fut le premier sur lequel Jake testa l'obéissance de ses clones. Heureusement pour lui, il était tombé sur un Jake docile à souhait. « Saute sur le lit » Et il sauta. Il le pensa très fort, il s’exécuta. Par pensée aussi c'était génial. Il n'avait jamais cherché à en faire plusieurs à la fois, mais ce jour là, il en créa sans le vouloir un autre. Jake se rendit alors compte qu'il pouvait se multiplier quand il le souhaitait. Assit en cercle, dans sa chambre avec ses deux nouveaux clones,s il passa alors trois heures à fermer les yeux, à tenter d'en fabriquer un autre, en vain. À cet âge là, Jake était incapable de savoir comment ses clones venaient.
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« Cours Jake, cours ! » Son autre lui arrivait presque à le distancer. Jake avait quinze ans. Il lui avait fallu du temps pour comprendre comment les autres Jake venaient à lui. Les émotions étaient la clef de tout ce mystère. Il pouvait en invoquer quand il le souhaitait, il le savait, mais il n'avait réussis qu'une seule fois. La plus part du temps, les clones venaient quand il était très content, très en colère, surpris, étonné, choqué... Bref. Pas vraiment pratique. Depuis qu'il avait compris ça, Jake ne mettait plus les pieds dans un cinéma, au risque de voir des tonnes de lui se répandre dans la salle au fur à et mesure des films. Et ce jour là, un clone rebelle (oui, il y en avait souvent, hélas, beaucoup trop souvent) s'était enfuis sans qu'il puisse rien y faire, avait passé l'après midi dans un bar à draguer une fille déjà casé. Et le petit copain baraque, en fureur, lui courait maintenant après. « Stop, arrête toi ! Mais bon sang, arrête toi andouille ! » Son clone s'arrêta, essoufflé. « Tu vas aller te faire casser la gueule, ok ? » « Pardon ? Pourquoi pas toi ? » « Parce que... » Oh, bon sang. Il n’aimait pas se faire la morale comme ça. « C'est toi qui a foutu la merde, après, tu reviens, et je te réabsorbe » « T'es pas cool » « C'est ça, c'est ça... » Il le poussa en avant et son clone tomba nez à nez nez avec le caïd du coin. Évidement il s'en prit plein la tête. Et au fond de lui, Jake ressentait toute cette douleur.
Les parents de Jake, dix ans après la mutation, s'était habitués. Ils n'avaient pas eu peur, au contraire il trouvait leur fils (maintenant) exceptionnel. Certes, de temps en temps, retrouver un clone errant en ville était un tâche compliqué, mais il avait planifié leur vie en fonction de celle de leur fils. Le fait que leur petit Jake ne maîtrise pas son pouvoir ne semblait pas les affoler aussi, quand ils entendirent parler de l'institue, ils refusèrent que leur fils y mette les pieds. Il était leur enfant, il restait avec eux. Et Jake ne fit jamais de commentaires à ce propos. Il termina sa études au lycée normalement, et se lança même dans les études supérieurs. Apprendre à maîtriser ses émotions, il n'avait jamais appris. Alors il croisait juste les doigts tout les jours pour ne pas faire de vague. Mais un beau jour, le Clone numéro 57 fila. Il fila sans même que Jake sache qu'il l'avait crée. Il n'en entendit même jamais parler.
A vingt et un ans, son père l’emmena à Las Vegas, voir le reste de sa famille. Sa grand mère habitait là-bas et Jake la voyait trop peu. Et ce fût là, dans le quartier résidentielle le plus tranquille de la ville, qu'il se vit. Au début, il cru rêver. Ce n'était pas possible. Et pourtant, il se voyait bien, là, en train d'arroser trois pauvres jardinières. Son autre lui ne sembla pas le voir. Alors Jake prit son courage à deux mains et alla sonner chez lui. Ce fût une femme brune, avec de grands yeux verts qui vint lui ouvrir la porte. Ses yeux s'agrandit encore plus quand elle le vit et sa bouche s'ouvrit en grand pour former un « o » presque parfait. « Que... » Ce fut aussi là qu'il nota la présence d'un enfant qui devait à peine avoir trois mois dans ses bras. « Bordel c'est quoi ce délire... » « Chéri ?! » La femme avait hurlé, et reculé d'un pas. Et son autre lui se pointa. Bon sang. Mais depuis quand il avait une femme et un enfant ? « Oh... » « Tu as un frère jumeau et tu ne m'en avais jamais parlé ? » « Je heu.. » Jake ne savait pas quoi dire, il bredouillait. Il nota aussi les bagues que les deux jeunes gens portaient. Bon sang, son clone s'était marié. MARIÉ. « Ça fait longtemps frérot ! » Et son clone le salua de la main. Évidement, il savait que s'il le serrait dans ses bras il y aurait de forte chance pour que Jake le réabsorbe. La femme accueillante alors à bras ouvert, lui présenta sa petite Lia (bon sang mais lui n'aurait jamais choisis ce prénom là) et lui servit un thé. Anglaise la madame. Le clone attendit qu'elle tourne le dos et retourna dans la cuisine. Jake plongea son regard dans le siens. « Non, ne me réabsorbe pas, s'il te plaît... » « C'est quoi ce délire... » « Je suis désolé, je voulais avoir une vie rien qu'à moi... » Allons bon. Un clone rebelle qui voulait faire sa vie. Et bien il avait plutôt bien commencé le bougre. « Écoute, je suis désolé mais... » « Je t'en pris, j'ai une petite fille... » D'ailleurs, comment avait-il fait ? Jake s'était toujours mis en tête que ces clones ne pouvaient pas avoir d'enfant. Il s'était peut-être dis ça pour se conforter après tout. « Mais réfléchis, on peut pas être des frères avec le même prénom... » « Je m'appelle Jake pour ma femme » « Allons bon ! Diantre ! Merde ! » Le femme fit de nouveau irruption. « Au fait, votre prénom, c'est quoi ? » « Wiccan » C'était sortit tout seul. « C'est original ça dis donc ! » Jake baissa la tête. S'il le faisait, c'était bien parce qu'au moins, quelque part dans ce monde, il avait une chance d'avoir vie normale. Enfin, lui, un de ces clones. Il vivrait sa vie par procuration.
Et sa nouvelle vie avait donc commencé après Las Vegas. Il avait changé de prénom. Pour son bien, pour le bien de Monsieur et Madame Allen qui vivant à Las Vegas. Wiccan, puisque c'était son nom à présent, avait baroudé pendant deux ans dans le monde entier, en sac à dos. Enfin, façon de dire. Il avait envoyé un de ses clones faire des études de psychologie en France. Il en avait envoyé un autre visiter l'Italie, un autre au Brésil, un autre au Japon. Au bout de deux ans, il les avait réabsorber, leur nouvelle connaissances avec. Voilà comment il se cultivait. Il avait en poche des tonnes de connaissances sur à peu près tout. Il avait enfin trouvé une utilités à ses clones. Un seul n'était pas revenu de son camp militaire. Ou en tout cas, pas comme il le souhaitait. Il avait fuis, le lâche. Wiccan avait alors noté que le côté sportif n'était pas cool à exploiter. A vingt quatre ans, ses parents décidèrent qu’il était temps pour lui de quitter le nid. Ils avaient fini par comprendre que leur fils, même s'il savait se servir de son don, était incapable d'une contrôler la base (sauf à de rares exceptions) c'est à dire, de créer ses clones quand il le voulait. Son père souhaitait le voir évoluer. « Mais papa, je peux pas, pas comme je suis... » Et alors l'institue s'était révélé être une idée. Elle s'était même imposé dans son esprit. Las-bas, il apprendrait. Avec ce qu'il avait appris, ce qu'il était, il pourrait même aider les gens. Alors il embrassa ses parents, et partis avec un sac à dos, et son diplôme en psychologie.
Voilà quatre ans qu'il était à la colonie. Tu parles d'un psy. Il était aussi déroutant que les élèves qui venait le voir. Complètement loufoque, il donnait des conseils vraiment étranges, mais qui semblaient fonctionner. Il n'avait pas réellement appris à se contrôler, de temps en temps, on pouvait voir le psychologue de l'institue courir après un de ses clones dans les couloirs. On pouvait aussi voir un de ses clones faire une rébellion dans le parc. Bref, le grand bordel. Il s'était même choisis un autre nom, histoire de faire encore plus énigmatique. Bref, c'était Wiccan, quoi. Étrange de A à Z. Mais il était heureux ici. Ses parents ne se faisait pas de soucis. Et vous savez quoi ? De temps en temps, il recevait même des nouvelles de Jake Allen à Las Vegas.